Timidité, peur de parler en public, peur de rougir dans certains contextes, inconfort dans les soirées ou dans les réunions professionnelles, voire difficultés à s’exprimer même avec des amis….la palette est large de la simple gêne à la grande pénibilité que peut provoquer la difficulté à interagir avec les autres. On parlera alors d’anxiété sociale ou de phobie sociale.
La phobie sociale associe la peur du jugement des autres, l’anticipation négative et l’évitement d’un certain nombre de situations sociales ou de performance.
Certaines de ces peurs sont fréquentes dans la population (la peur de parler en public toucherait presque un tiers des sujets interrogés !). Nombreux sont ceux et celles qui redoutent une soirée où ils ne ne connaissent pas grand monde. Mais il y a peur et peur. Pour certaines personnes, l’intensité de l’angoisse provoquée par la situation redoutée est telle que l’évitement est la seule issue, au prix parfois de sacrifices disproportionnés comme celui de choisir son métier ou ses études en fonction de ces évitements. L’anxiété sociale, quand elle est importante, est la cause d’une souffrance très importante, parce que l’être humain est un animal social, et que l’on est, qu’on le veuille ou non, constamment confronté aux autres. On peut éviter les chiens si on est phobique sans que sa vie en soit très impactée, et surtout sans blessure narcissique. Sentir que l’on n’est pas à l’aise avec les autres est beaucoup plus douloureux, et chaque journée fourmille d’occasion de se sentir en situation d’échec. Un sentiment de honte est souvent associé à ces difficultés, à l’idée de paraître ridicule au regard des autres.
Troubles voisins de l’anxiété sociale :
- La timidité est une appréciation subjective (est timide celui qui ses sent timide, même si les autres peuvent en être surpris parce qu’ils ne ressentent pas de difficultés d’interaction chez cette personne). On l’associe plutôt à un trait de personnalité, favorisé par les expériences précoces. On parle aussi d’un continuum entre la timidité et la phobie sociale qui en serait la version plus handicapante. La personne timide aurait tendance à pouvoir gagner en confiance si elle se sent acceptée, et pouvoir donc nouer des relations sociales plaisantes, quand la personne phobique sociale se sentira difficilement en sécurité avec les autres.
- L’anxiété de performance, est une anxiété de situations, qui prévaut typiquement dans les épreuves sportives, les concerts de musique, les examens, toutes circonstances qui impliquent d’être confronté à un public et d’être jugé sur sa prestation. C’est un trouble différent de l’anxiété sociale au sens où les situations concernées sont très spécifiques, mais il peut s’en rapprocher, et il lui est souvent associé.
- Le trouble de la personnalité évitante. On parlera de personnalité évitante quand les difficultés touchent essentiellement les relations aux personnes en général, et non des situations sociales spécifiques. La personnalité évitante n’arrive pas à faire confiance, elle craint le rejet, et préfère ne pas s’exposer que de risquer l’humiliation. La gêne peut être présente même dans l’intimité avec des personnes bienveillantes.
QUEL EST LE MÉCANISME MENTAL DE L’ANXIÉTÉ SOCIALE ?
Pour les psychanalystes, tout tient à la vision que le phobique social a de lui même : celle d’un être profondément imparfait, dénué d’intérêt. C’est sur le narcissisme défaillant qu’il faut donc travailler. Les psychologues comportementalistes pensent plutôt que la phobie sociale est la conséquence de pensées erronées sur soi-même ( anticipations négatives de la situation, jugement exagérément négatif sur la performance effective, et sur les conséquences de celle-ci en terme de jugement par les autres), et d’un excès de centration sur soi pendant la situation, à la recherche des premiers symptômes anxieux (coeur qui s’emballe, souffle coupé, idées brouillées, vertige, transpiration, tremblements, incapacité rassembler
ses idées…)
Il est évident que les anticipations négatives et l’hyper-vigilance vont précipiter la survenue des symptômes redoutés, et induire une baisse de la « performance » réelle, qui elle même entraînera une augmentation du sentiment d’échec et des projections négatives sur le futur.
A quoi ressemble une thérapie de l’anxiété sociale ?
Les TCC seront très utiles pour :
- travailler sur les pensées négatives (« Vous pensez que tout le monde a vu votre tremblement, mais en êtes-vous certain ? » « Vous dites que votre exposé était nul, mais avez-vous demandé un retour à quelqu’un de l’assistance ? » « En supposant que vous ayez raison et que votre performance ait été mauvaise, quelles sont concrètement les conséquences ? » « Est-ce si grave ? » etc.
L’idée est d’arriver à prendre de la distance par rapport à une vision exagérément pessimiste.
- donner des outils (relaxation, décentrement attentionnel…) pour mieux gérer les situations redoutées.
- préparer les expositions progressives aux situations redoutées, en allant toujours au rythme du patient, pour lui réapprendre la confiance dans ses capacités à affronter
- travailler au besoin les techniques d’affirmation de soi (apprendre à faire une critique, à exprimer une demande etc..)
- si besoin renforcer les « compétences sociales », s’entraîner aux conversations dans différents contextes. Les jeux de rôle entre le patient et le thérapeute s’avèrent très utiles pour ces mises en situation.
Au delà de ce travail très concret, il sera indispensable de s’intéresser à l’histoire du patient, et de repérer tous les « mini-traumas » sur le plan relationnel qui ont fait le lit de ces difficultés. Bien souvent on trouvera des épisodes de rejet, de harcèlement, de moqueries, de trahisons d’amitié, préférentiellement en primaire ou au collège. Parfois aussi des parents très exigeants ou critiques auront favorisé la perte de confiance.
Il s’agira alors de tenter de « réparer » l’Enfant intérieur » blessé.